Ressources

1. LES EAUX DE SURFACE

L’essentiel des réserves en eau de surface est localisé dans les bassins des fleuves Sénégal et Gambie dont les eaux proviennent du massif du Fouta Djallon, en République de Guinée. À côté de ces deux grands fleuves, il existe des cours d'eau de moindre envergure caractérisés par des écoulements intermittents. Il s’agit de la Casamance, de la Kayanga avec son principal affluent l'Anambé, le Sine, le Saloum et les marigots côtiers.

Un certain nombre de lacs et mares répertoriés complètent ce réseau hydrographique ; les plus importants étant : le lac de Guiers, les bolongs des zones estuaires et les mares de la région des Niayes du littoral nord et du Ferlo.

Le bassin lacustre du Guiers fait partie intégrante de la vallée du Sénégal. Sa délimitation s’avère très délicate à cause du caractère peu contrasté du micro-relief de la région et de la complexité du maillage hydrographique des différents tributaires et émissaires du lac de Guiers.

Le volume du lac de Guiers est estimé à 601 millions de m3, lorsque le plan d’eau atteint la digue à 1,80 IGN. Il est alimenté par le fleuve Sénégal à partir du canal de la Taouey. Ce lac constitue un écosystème particulièrement vital pour toute la partie Nord-Ouest du pays, mais aussi une réserve d’eau douce permanente très importante. Il constitue l'une des principales réserves d'eau douce du Sénégal qui assure l’alimentation en eau potable de la capital du Sénégal.

2. LES EAUX SOUTERRAINES

Les eaux souterraines ont toujours été une composante essentielle du potentiel en eau du Sénégal, mais encore plus prépondérante depuis le début de la sécheresse. En effet, bien que le pays dispose de fleuves de grande hydraulicité (plus de 26 milliards de m3 par an), de vastes zones, jadis traversées par des cours d'eau, sont devenues presque totalement dépourvues d'eau de surface par suite d’assèchement des rivières.

2-1- Caractérisation des systèmes aquifères

Les différentes études hydrogéologiques, hydrodynamiques, géophysiques réalisées sur le bassin sédimentaire sénégalais ont permis d’identifier quatre quatre (04) grands systèmes aquifères correspondant aux principales formations géologiques :
– le système aquifère superficiel dit « complexe terminal »qui regroupe les formations à dominante sablo-argileuse et sableuse du Quaternaire (QT), du Continental Terminal (CT) et de l'Oligo-miocène (OM). Intéressantes dans le sud du pays, les nappes diminuent notablement dans le Ferlo. Les réserves sont estimées à 50-75 km² ;
– le système aquifère intermédiaire qui regroupe les formations essentiellement calcaires, karstiques par endroits, et marno-calcaires de l'Eocène (EO) et du Paléocène (PA). La nappe la plus importante est celle des calcaires paléocènes qui communique plus ou moins directement avec la nappe maastrichtienne. Elle est activement exploitée notamment pour l’alimentation en eau de Dakar dans la région de Sébikotane où elle est située à faible profondeur. Les réserves sont estimées à 100 km3 ;
– le système aquifère profond qui concerne la seule formation sableuse à sablo-argileuse ou gréseuse du Maestrichtien (MA), s’étend sur la quasi-totalité du bassin sénégalais et constitue un immense réservoir. Les réserves sont estimées entre 300 et 500 km3 ;
– le système aquifère du socle qui regroupe les aquifères discontinus à semi-continu de fissures et d'altération des formations granitiques et métamorphiques du Sénégal oriental (sud-est), avec des nappes dont la qualité et le volume ne sont toujours pas satisfaisants.

La figure ci-dessus résume la caractérisation spatiale des différents aquifères sur l’ensemble du Sénégal.

Carte hydrogéologique des eaux souterraines du Sénégal
Source : base de données DGPRE

Ces systèmes aquifères renferment des nappes dont la profondeur, le potentiel et la qualité chimique des eaux, diffèrent d’une région à l’autre

  • la nappe profonde qui correspond à celle des sables et des grès du Maestrichtien : elle couvre les 4/5 du territoire avec une potentialité de 500 000 m3 /j. Elle est la nappe la plus exploitée avec des forages atteignant parfois plus de 500 mètres de profondeur avec des débits variant entre 100 et 205 m3/h et de faibles rabattements d'affleurement ou.de subaffleurement du toit du Maastrichtien, que ARCHAMBAULT (1960) qualifie de zones préférentielles d'alimentation de la nappe maastrichtienne ;
  • les nappes semi - profondes qui sont représentées par celles :
    – des calcaires du Paléocène à l'Est du massif de Diass à l’Ouest du Lac Tanma et dans les régions de Thiès et Fatick avec une potentialité de 68 000 m3/j. Elles sont captées à partir des forages de profondeur maximale avoisinant les 100 mètre et des puits ;
    – des calcaires du Lutétien entre Bambey et Louga d'un potentiel de 115 000 m3/j. Elles sont captées par des forages et des puits essentiellement avec une profondeur avoisinant les 100 mètres. La nappe de l’Eocène est représentée sur tout le bassin sédimentaire, excepté la zone d’affleurement ou de subaffleurement du Maastrichtien où elle a été érodée.
  • les nappes superficielles sont les plus accessibles et font l'objet d'une surexploitation par des puits et des forages comme c'est le cas de la nappe des sables de Thiaroye. Elles représentent la famille des nappes les plus vulnérables représentée par :
    – la nappe du continental terminal qui couvre la quasi totalité du Sénégal avec une potentialité de près de 450 000 m3/j revue à la baisse ces dernières années ;
    – la nappe des sables des alluvions du fleuve Sénégal, les sables du littoral Nord de Saint-Louis à Dakar, les sables infrabasaltiques de Dakar, les lentilles du fleuve Sénégal, les lentilles d'eau douce des îles du Saloum et de la Basse Casamance. Leur potentialité est estimée à 273 000 m3/j ;
    – de la nappe de l'Oligo-Miocène localisée sur la bordure méridionale du Ferlo entre Kaffrine et Tambacounda et sur la partie sud du pays (Casamance) avec un potentiel estimé à 105 000 m3/j.
  • la Nappe de la zone du socle située dans la partie sud du pays dans la région de Tambacounda. Elle est difficilement mobilisable du fait de sa discontinuité et de la compacité du réservoir. Les potentialités de l’aquifère du socle sont estimées à 3.6 millions de m3 par an avec des débits moyens variant de 6 à 10 m3 / heure et pouvant atteindre localement plus de 30 m3/h. Cette nappe est actuellement captée par des forages de 40 mètres de profondeur maximale.

2-1-1- La nappe des calcaires du paléocène

La nappe du paléocène est surtout connue et exploitée dans le secteur occidental du pays dans les environs du Horst de Diass au niveau du compartiment de Pout et Sébikotane et dans la zone de Mbour. Epais d’une centaine de mètre, le paléocène est constitué à sa base de marnocalcaires qui sont remplacés à l’ouest par des calcaires coquillers et par des marnes au nordouest à l’est et au sud.
Dans le secteur du horst de Diass, une décroissance du niveau piézométrique témoigne de la surexploitation de l’aquifère dans le horst de Diass et du déficit pluviométrique depuis les années 70. Ces contraintes ont entrainé une baisse générale de la piézométrie.
Dans la partie sud de l’aquifère (vers Mbour-UGP 2) les variations enregistrées sur le piézomètre SE 31 montre également une chute importante du niveau de la nappe jusqu’à 1985 (PSE, COWI / Polyconsylt ; 2001)
Dans la zone de Mbour l’étude chimique de Faye, 1994, montre l’existence d’un couloir d’eau douce (0,4 à 1 mg/l de résidu sec) encadré à l’est au sud et à l’ouest par de l’eau saumâtre avec des résidus secs pouvant jusqu’à 10 g.l-1.

2-1-2- Le système aquifère du Continental terminal

L’aquifère continental terminal est constitué d’une alternance de sables et d’argiles dans sa partie sud (Sine Saloum et Gambie), de sables et de grés argileux dans le Ferlo, d’argile avec quelques lentilles de sables au Nord. Les épaisseurs sont relativement grandes (150m) et sont liées aux variations morphologiques du toit des marnocalcaires de l’éocène et du paléocène. Sur la bordure ouest, ce toit montre une succession de vallées fossiles avec localement des épaississements de la série. Il se relève ensuite rapidement vers l’est formant une zone haute entre Touba Mérina au nord et Diourbel au centre où le Continental Terminal devient peu épais ou inexistant. A partir de cette zone, le toit des marno calcaires plonge vers le centre du bassin où les épaisseurs peuvent atteindre 100 à 150 m puis se relève graduellement vers le fleuve à l’est.
La surface piézométrique de la nappe présente une importante dépression au centre du Ferlo avec des côtes pouvant atteindre – 60 m (Faye, 1994).
A l’est du méridien passant par Bignona - Ziguinchor , la profondeur du toit de la nappe du Miocène varie de 100 à 200 m au niveau de la région naturelle de Casamance, tandis que celle du Maastrichtien varie de 140 m à plus de 600 m avec une eau douce. Les débits généralement bons sont plus favorables dans la zone de Kalounayes où ils peuvent atteindre des débits spécifiques de 5 à 30 m3 / h/m.
A l’ouest d’un méridien passant par Bignona – Ziguinchor, Un système composé du Continental Terminal (CT) et de l’Oligo - miocène en continuité, reposant le tout sur un aquifère profond maastrichtien à eau fortement minéralisée.
Cet aquifère couvre l’ensemble de la Casamance naturelle. La totalité des puits villageois, traditionnels et modernes, captent cette nappe à une profondeur généralement faible.
La profondeur de cette nappe varie de quelques mètres aux abords des marigots à 25 m environ sous le plateau dans la région de Ziguinchor. Et bien que les débits extraits soient relativement faibles (de l’ordre de 10 m3 / h), cette nappe est primordiale car elle permet la satisfaction des besoins en eau des villageois, du bétail en saison sèche et le maintien du couvert végétal.
Localement dans certaines zones plus favorables, les débits extraits de cette nappe sont relativement importants :
– Ziguinchor : trois forages captent cette nappe à moins de 50 m de profondeur pour les besoins de la ville avec des débits de 45 à 50 m3 / heure ;
– Cap- Skiring : tous les forages captent le C.T avec des débits extraits de l’ordre de 10 à 20 m3 / heure pour les besoins des hôtels.
L’eau de la nappe superficielle est généralement douce, favorable aux besoins domestiques et à l’irrigation. Cependant, elle est saumâtre aux abords des marigots à cause de l’avancée de la langue salée et elle est exposée à la pollution anthropique.
Au point de vue qualité de l’eau, la minéralisation reste favorable sauf dans les zones polluées du bassin du Fleuve Casamance et de ses affluents. Cette salinité est beaucoup plus perceptible avec la nappe du CT où on peut avoir une teneur en résidu sec de plus de 3000mg/l (Santhiaba Mandiaque et Emaye) dépassant les directives de l’OMS à savoir 1500mg/l. A cela s’ajoute les pollutions anthropiques (nitrate) notées dans les zones périurbaines des grands centres urbains (Ziguinchor).
Les eaux sont peu minéralisées avec des résidus secs qui sont toujours inférieurs à 1 g. l-1. Elles sont bicarbonatées calciques vers le centre du bassin et chlorurées sodiques vers la périphérie. (Faye, 1994).
L'aquifère du Continental Terminal est exploité par forages dans la zone de Dakar, sur le Littoral nord, à l'est du Sine-Saloum entre Nioro du Rip et Koungheul, en Casamance et dans la moyenne et la haute vallée du fleuve Sénégal. Il est également exploité par de nombreux puits cimentés, généralement profonds (plus de 30m), notamment dans la région de Kaffrine et sur la bordure orientale du bassin sédimentaire.
L'aquifère de l'Oligo-Miocène est exploité par forages à des débits relativement faibles en Basse et Moyenne Casamance et dans la zone comprise entre Kaffrine et Tambacounda où ses caractéristiques hydrodynamiques et hydro-chimiques sont favorables.

2-1-3- La nappe alluviale

Les dépôts détritiques argilo-sableux du « Continental Terminal et du Quaternaire recèlent une nappe alluviale qui correspond au lit majeur du fleuve, avec des épaisseurs comprises entre 20 et 50 m.
L'écoulement de la nappe s'inverse entre la crue et l'étiage du cours d'eau. Cette nappe est en rapport avec les nappes sous-jacentes en raison de la variabilité des formations et de leur disposition lenticulaire. L'importance de cette nappe est fonction de l'épaisseur et de l'étendue de ces formations.
L’étude de ILLY (1973) montre bien les relations hydrodynamiques entre le fleuve, la nappe alluviale et les aquifères sous jacents qui se résume ainsi :
– le fleuve et la nappe contiguë constituent une source de recharge pour les aquifères profonds contenus dans les formations du Continental terminal, de l’Eocène et du maastrichtien ;
– la nappe alluviale est alimentée par le fleuve en période de crue et réciproquement, sa vidange se fait au bénéfice du fleuve en saison sèche, elle soutient de la sorte le débit de base du fleuve en aval de Bakel.
La relation hydraulique entre les différentes nappes (nappes alluviale, Eocène et Maastrichtien) est globalement très bonne.
Les eaux sont en général de qualité médiocre pour l’alimentation en eau potable. La zone du Delta connaît des remontées de taux de minéralisation (sels d’origine marine dans la nappe) à chaque période de hautes eaux. Sur la Vallée et le Haut Bassin, les eaux sont nettement moins minéralisées. C’est sur la partie ouest de la vallée et en période de hautes eaux que l’on trouve les taux de minéralisation les plus élevés dans la nappe alluviale. Les taux ont tendance à diminuer par rapport à ceux déterminées en 1973.

2-1-4- Le système aquifère du Maestrichtien

Cette nappe a fait l'objet de nombreuses études, notamment celles de Travi, (1988) et Faye, (1983, 1994) sur l'hydrodynamisme, l'hydrochimie et la géochimie isotopique.
La surface piézométrique générale montre un écoulement du Sud-est vers le Nord-ouest avec un gradient très faible (2.10-4 à 5. 10-5) qui s'inverse très localement sur les bords Ouest et Nord du bassin. Au Nord et Nord-est, l'écoulement s'effectue vers le centre du bassin en direction du creux piézométrique situé à l'Est du lac de Guiers. Les transmissivités sont comprises entre 10-2 et 10-4 m2. s-] . (S… EL FAID, 1999).
Les études isotopiques de (Faye et al., 1984) ont montré que l’alimentation de la nappe profonde ne s’effectuait pas au niveau de l’affleurement maestrichtien du Horst de Diass, mais plus à l’est à partir du calcaire paléocène karstique. L’inversion de charges liée aux pompages pour l’alimentation en eau de Dakar a donc pour conséquence grave d’interrompre la recharge de la « nappe maestrichtienne ».
Les eaux faiblement minéralisées à l'Est (teneurs en chlorures <1 meq.r1), se caractérisent par des faciès bicarbonaté calcique et bicarbonaté sodique. Elles évoluent vers le faciès chloruré sodique à l'Ouest avec une augmentation brutale des teneurs en ions majeurs. Cette discontinuité chimique serait liée à la présence d'eaux profondes sursalées (Faye, 1994).
La distribution spatiale des caractéristiques géochimiques, alliée aux grands traits structurants de l’hydrogéologie régionale (Cowi-Polyconsult, 2000, Doc. Trav.03 –lot1) conduit à la délimitation de 3 grandes unités géochimiques d’orientation globalement méridienne :
– la zone est à l’est du méridien 15°30’, caractérisée par des eaux bicarbonatées généralement à faible minéralisation, croissant lentement vers l’ouest et pouvant localement devenir plus sulfatées ; – la zone centre salée, caractérisée par la présence des eaux chlorurées sodiques à minéralisation élevé, partant de l’embouchure du Sine Saloum jusqu’au Lac de Guiers, le long de l’axe N-S Louga-Kaolack; – la zone du Horst de Diass, à l’ouest de la falaise de Thiès, sur une bande étroite à l’affleurement du Maestrichtien jusqu’au début de la péninsule du Cap Vert, caractérisée par des eaux bicarbonatées, généralement de faible minéralisation.
L’analyse et le traitement des données quantitatifs de suivi de la nappe a permis d’établir les résultats suivants.
Dans le secteur du horst de Diass, une décroissance du niveau piézométrique témoigne de la surexploitation de l’aquifère dans le horst de Diass et du déficit pluviométrique depuis les années 70.
Dans le bassin arachidier, l’analyse des données piézométriques montre que l’aquifère est moins sollicité par rapport aux autres.
Le bassin arachidier centre est caractérisé par une nappe fluorée et salée. La nappe des sables du Maestrichtien est captée par la presque totalité des forages réalisés dans la zone. Elle se situe entre 250 et 450 m avec des débits assez intéressants (50 m3/h), mais le taux de fluor est parfois excessif (entre 4 et 5 mg/l). Il en est de même des extraits secs qui peuvent atteindre 1.100 mg/l à Kaolack. La qualité de l’eau est assez médiocre, avec des teneurs en sel dépassant parfois 1,5 g/l et plus de 1 mg/l de fluor, particulièrement dans certaines localités comme le département de Bambey.
En résumé on peut dire que les caractéristiques géométriques des systèmes aquifères sont les suivants :
– les profondeurs de captage que doivent atteindre les forages sont de 50 à 100 m pour les aquifères superficiels, de 100 à 200 m pour l'aquifère intermédiaire calcaire et de 200 à 500 m pour l'aquifère profond du Maastrichtien ;
– les épaisseurs des différentes formations aquifères sont de 20 à 175 m pour les niveaux superficiels, 25 à 350 m pour les calcaires et 100 à 2.000 m pour le Maestrichtien ;
– le Horst de Diass joue un rôle très particulier avec son cœur maastrichtien, ses flancs paléocènes et sa structure faillée: il est à la fois zone d'alimentation et d'exploitation ;
– les formations aquifères du Miocène et de l'Oligo-miocène ont une extension limitée approximativement en Casamance au niveau du bassin versant de la Gambie, tandis que les calcaires éocènes y sont beaucoup plus marneux et peu perméables.

2-1-5- LE SYSTÈME AQUIFÈRE DU SOCLE

Les formations du socle occupent la pointe Sud-est du Sénégal sur une superficie de 32.750 km², soit 17% du territoire national et font partie de la bordure occidentale du bouclier africain. Ce système aquifère du socle est capté par des forages qui se trouvent essentiellement dans les régions de Tambacounda, Kédougou et Kolda. Ils sont présents aussi dans le sud de la région de Matam. Les débits prélevés sont généralement faibles de l’ordre de 2 à 5 m3 /h et rarement 10 m3 /h